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Les échos d'aktao

Blog des Tendances qui vont transformer les Entreprises

Un nouvel homo économicus

L'émergence d'un nouvel homo économicus dans les organisations ? - Edgar Morin

De façon concrète on peut se demander comment ces grands principes impactent aussi les modes de penser quotidiens des acteurs économiques. C'est en interrogeant les directions d'entreprise qu'il est possible d'en avoir une perception. Beaucoup de dirigeants, en effet, ont compris qu'il fallait mettre en scène de nouveaux comportements plus en cohérence avec les situations réelles auxquelles leurs collaborateurs sont confrontés.

Si dans l'océan rouge de la compétitivité prix, il fallait parcelliser les tâches pour accroitre les volumes de production dans un temps donné, il est nécessaire aujourd'hui qu'ils aient une intelligence globale des contextes dans lesquels ils sont impliqués. Cela passe par une plus grande compréhension des enjeux stratégiques et concurrentiels de l'entreprise. Les méthodes de management par objectifs peuvent constituer une excellente médiation pour cela. Il s'agit désormais d'avoir une intelligence systémique de l'action et non plus ponctuelle. La question du sens en termes de direction est devenu un thème clé du management actuel.

La créativité des acteurs devient également une ressource clé. Il faut trouver des sources de création de valeur à tous les niveaux. L'innovation ordinaire (N. Alter, 2010) comme l'innovation stratégique deviennent la nouvelle norme. On met en place pour cela des méthodes pour recueillir et récompenser les idées des collaborateurs. La démarche de l'innovation participative en est un exemple. Sur le plan stratégique, la différenciation constitue un axe privilégié du développement (C. Blanc, 2002).

Ces nouvelles orientations remettent en valeur l'importance des activités de conception par rapport aux activités d'exécution qui avait été largement privilégiées dans une économie de production. Cela se traduit par une évolution des ressources consacrées à la recherche développement qui est passé de 2,17% du PIB en 1998 à 2,3% en 2004 (même si la France n'est pas dans la moyenne espérée par les accords de Barcelone en 2002 qui fixait la barre à 3%). La créativité passe par la capacité des acteurs à solliciter leur imagination et combiner les informations entre elles. Elle relève d'une discipline encore méconnue en france : l'heuristique qui est enseignée dans les classes maternelles en Finlande alors qu'elle apparait timidement aujourd'hui dans les grandes écoles.

Le développement des projets et le management par processus invitent les acteurs à collaborer de façon plus transversale et à sortir du fonctionnement taylorien en silo. Cette évolution a été largement préparée par la mise en place d'organisation matricielle dans les années 1995 et l'optimisation des relations clients fournisseurs internes encouragées par les démarches " qualité ". La mise en place d'ERP et d'outils collaboratif n'ont fait que renforcer cette évolution.

Le capital immatériel devient une référence de plus en plus prise au sérieux par les managers. Les dirigeants d'entreprise ont compris que l'investissement dans l'immatériel devenait décisifs. Cette recherche donne lieu à nouvelle discipline le knowledge management qui propose des concepts et des méthodes novatrices pour identifier et organiser la distribution de cette richesse dans l'organisation.

Tandis que l'internationalisation des entreprises conduit peu à peu les acteurs à élargir leur horizon et à intégrer l'interculturel dans leur activités professionnelles, le client prend une place de plus en plus significative dans la conscience des collaborateurs. Cela se traduit par la mise en place de stratégie de service formalisée et déclinée à tous les niveaux (service management) et par des organisations centrées sur les besoins des clients (Servuction, Langeard, Eiglier,1987).

L'entreprise par ailleurs est devenue biologique. Elle est soumise à des restructurations plus ou moins bien anticipées (Trouve, Casalegno, 2009). On s'interroge aujourd'hui sur les facteurs qui pourraient rendre les entreprises plus agiles. Cette agilité est d'autant plus nécessaires que les changements doivent se faire rapidement. Dans les nouvelles organisations c'est donc aussi le rapport au temps qui est transformé. Nicole Aubert (2009) résume de façon intéressante ce qui se passe à ce niveau : " Je crois que nous sommes passés d’une période où nous étions soumis au temps, nous nous insérions dans les contraintes du temps - mais sans violence - à une période où nous ne cessons de violenter le temps pour en tirer le maximum de profit et de plaisir. Jadis, nous nous coulions dans les rythmes du temps, qu’ils soient scandés par les cloches du couvent, à l’époque des travaux des champs, ou par celle des beffrois, au temps du négoce et des marchands, puis, plus tard, par celle des horloges pointeuses dans les usines. Le temps des individus était rythmé par les obligations de la vie sociale et du travail, c’était un temps contraint, partiellement, mais qui ne débordait pas les individus. Nous ne tentions pas de forcer le temps. Notre rapport au temps est désormais sous-tendu par des exigences d’urgence, d’instantanéité, d’immédiateté, de réactivité constante, qui sont l’aboutissement de la logique d’accélération qui imprègne toute l’histoire du capitalisme et qui ont été induites par l’avènement des nouvelles technologies de la communication et par la dictature du temps immédiat qui sous-tend l’économie. Sur un plan économique et professionnel, nous sommes désormais soumis à une obligation de réactivité immédiate et nous devons répondre " dans l’instant " parce que la compétition économique a basculé dans le champ du temps. Ce n’est plus seulement par la conquête de nouveaux espaces que l’on conquiert de nouveaux marchés ; c’est en étant plus rapide que les autres, en gagnant du temps, aboutissement ultime de cette logique capitaliste pour laquelle " le temps, c’est de l’argent " et qui s’est traduite par une accélération de plus en plus forcenée ". (Failly, Culture Nex, 10 Janvier 2006)

Cette description met bien évidence qu'un nouvel individu est en train d'émerger dans les organisations, très différent de celui qui résidait dans l'univers stable de l'économie de production. Cette évolution s'est faite peu à peu. Il semble cependant que les systèmes cognitifs et relationnels aient pris un peu de retard dans cette mutation qui ne bouleverse pas seulement les individus dans leur vie professionnelle mais aussi personnelle.

Homo economicus film réalisé par EICAR 2010

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